Alors que l‘actualité d’acteurs majeurs du Web nous fait entendre de plus en plus ces acronymes, ACTA, PIPA et SOPA, petite synthèse de ce dont il s’agit. D'abord pour moi, autant partager.
SOPA, dernière version en discussion de PIPA
Stop Online Piracy Act, est aujourd’hui un projet de loi, entré dans le circuit législatif des Etats-Unis le 26 octobre 2011, et qui s’inscrit dans la continuité du PRO-IP Act (PIPA !) de 2008 tout en complétant de manière significative la législation en vigueur actuellement, le Digital Millennium Copyright Act de 1998.
Il permet de renforcer l’arsenal juridique à la disposition du département de la justice US afin de préserver les droits d’auteurs et ayants droits contre leur violation et contrefaçon en ligne. Cet arsenal, discuté par les législateurs US, a la particularité d’être une bombe atomique dont les retombés radioactives peuvent toucher l’ensemble du web, étant pour sa plus vaste zone sans frontière mais fortement dépendant des infrastructures et d’acteurs établis sur le sol US.
Pour faire simple, le département de la justice US peut poursuivre des acteurs non US et obliger des gestionnaires US (google pour le référencement, l’ICAN pour le routage des adresses IP, AT&T pour les tuyaux, PayPal pour l’intermédiaire de paiement,...) à “oublier” (en le blocant) l’accès au contrevenant. A défaut de réussir à fermer un site hébergé à l’étranger, on coupe les passerelles (US) qui lui permettent d’être connecté à Internet. On l’asphyxie.
Si le procédé est subtile, surtout vu les tentatives de légitimer les attaques par dénis de service contre ces sites que l’on a rencontrées dans le passé, c’est les modalités de mise en oeuvre induites qui posent problème. Car pour mettre dans le noir tous les échanges avec un site, il faut inspecter systématiquement et en temps réel tout le traffic entre tous les sites. Celà revient à dire que pour trouver du hach dans une voiture en provenance d’Amsterdam, on va fouiller toutes les voitures dans le monde dès qu’elles changeront de route.
Ainsi, de nombreux acteurs, dont les fournisseurs d’accès à internet apparaissent comme les plus sensibles car étant en première ligne avec les usages des internautes, devront avoir connaissance et agir sur le traffic à tout instant.
Du fait des nombreuses protestations depuis fin octobre, et en particulier d’actions coup de poing comme la mise en berne de sites importants le 18 janvier 2012, le projet est pour le moment en pause, le temps de trouver une solution plus consensuelle.
ACTA, ce n’est pas du PIPO
L’Anti-Counterfeiting Trade Agreement lui avance, et ce n’est pas de la tarte.
1) Il est total : il couvre tous les objets de la contrefaçon, le périmètre du PIPA n’en étant qu’un volet aux côtés des médicaments génériques, des sacs à main et des techniques ancestrales de tannage du cuire d’Issoudun.
2) il est global : il ouvre tous les pays signataires... et leurs échanges. Un aperçu des signatiare clot le débat : UE, Etats-Unis, Japon, Corée, Australie, Singapore ou les Emirats Arabes. Ok, il manque la Chine, la Russie et l’Amérique du Sud... pays fortement concernés par la contrefaçon.
3) Il est émancipé : ACTA a organisé sa propre gouvernance et son propre cadre législative, hors des instances existantes.
4) Il est maintenant : ces discussions alternatives sont engagées depuis 2006. Nous sommes à l’étape des signatures. Le dernier round de négociation s’est tenu à Tokyo en 2010. La ratification Européenne doit être réalisée selon ses règles intérieures d’ici le 1er mai 2013. Une version d'Avril 2010.
Par analogie avec les directives communautaires européennes qui sont transposées dans le droit des pays membres, PIPA et sa mise à jour SOPA sont la transposition en droit local les accords de principes d’ACTA du 2 octobre 2010.
Petit rappel de droit : les traités internationaux sont d'un niveau hierarchique suffisant pour s'imposer ou se confronter aux lois nationales (locales) des pays signataires. Dans de nombreux cas ils s’imposent à elles (parfois avec difficultés). Souvent seule la constitution reste d'un niveau plus élevé.
Et notre Hadopi français dans tout ça ?
Par rapport à ACTA, l’Hadopi et son arsenal apparaissent comme des joueurs de billes. Aussi répressif soit-il, l’autorité publique indépendante a le mérite de mandater une force publique sur décision d’un juge pour regarder ce que vous faite, et non de regarder ce que vous faites et de se demander si elle en parle à un juge, ou à quelqu’un d’autre.
Au passage, cette contrainte, mais dans le respect de l’appareil judiciaire, est ainsi en France grâce à la CNIL. Cet autre autorité publique indépendante est peut être critiquée pour ne rien comprendre aux pratiques de l’internet social, mais n’a au moins pas oublié le principe de vie privée.
Image au début de cet article : logo de ce site singulier (et qui n'a rien à voir avec le premier degré de cet article) : http://www.pipa.be/fr
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